Lycée de Milhaud - classe de 2g6

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Correction Texte 1 : Pierre de RONSARD, "Discours des misères de ce temps", 1562.

 

Texte 1 : Correction

 

 

 

Questions préparatoires maison :

Repérer les personnages, les métiers, les étapes du texte;

Rédigez : A quoi voit-on l'intensité de ces guerres ? A quoi voit-on la force de l'engagement du poète ? 


Vocabulaire :

 

  • accumulation : figure de style consistant à énumérer de nombreux éléments, pour créer une impression de désordre, d'oppression par exemple.

 

  • hyperbole : figure de style consistant à utiliser les procédés de l'exagération tels que par exemple les superlatifs

 

  • parallélisme : figure de style et de rythme consistant à répéter une structure grammaticale

 

  • enjambement : en poésie, c'est le fait de ne pas avoir de signe de ponctuation à la fin d'un vers, et d'enchaîner directement la lecture sur le vers suivant. Cela crée un effet de rapidité et rend le rythme irrégulier.

 

  • rejet : en poésie, figure de rythme dans laquelle une phrase occupe un vers entier, mais se termine au tout début du vers suivant.

 

  • contre-rejet : c'est l'inverse du rejet : une phrase occupe la totalité d'un vers, mais commence à la fin du vers précédent.

 

Observation du texte :

 

 

 

Le texte n'est qu'un extrait d'un poème plus long. Il est rédigé en alexandrins et présente un découpage en strophes, mais irrégulières. Les rimes sont disposées de manière assez simple, suivies (on dit aussi plates).

 

Le contexte : les guerres de religion qui, au XVIème siècle, font des ravages et divisent le pays. Ronsard est du côté des Catholiques, et donc opposé aux Protestants.

 

 

  • La structure du texte : Quels sont les grands mouvements de cet extrait ?

 

 

On observe une progression du texte : le poète passe d'un aspect à un autre. Pour déterminer ces étapes du texte, il était intéressant d'observer les personnes mentionnées.

 

  • 1er mouvement : Quelles sont les personnes et les catégories sociales mentionnées ?

des vers 1 à 8, le poète énumère les membres de la cellule familiale sous forme de généralisations (des termes singuliers pour désigner tous ceux d'un groupe) :

 

le fils / le père

le frère

la soeur

les cousins germains

l'oncle / le neveu

le serviteur / le maître

(au sens étymologique, la "famille" désigne tous ceux qui résident sous le même toît, y compris les domestiques donc)

la femme / le mari

les enfants

 

On peut donc parler d'accumulation. Notes l'impression de désordre créée par le fait qu'il y ait une seule phrase pendant 6 vers ! Le choix des "paires" souligne le fait que c'est un phénomène contre-nature.

Vous avez aussi repéré le champ lexical des armes et de la violence :

"arme", "sang", "disputent"... ainsi que la répétition de la préposition "contre". Le poète insiste donc lourdement sur le fait que ce désordre s'est immiscé jusqu'au plus profond de la population.

Une autre préposition est répétée, c'est la préposition privative "sans" aux vers 7 et 8 ("sans raison", "sans ordre et sans loi") : il s'agit d'un parallélisme anaphorique. Car ce conflit est destructeur.

 

Le coupable de tout cela, c'est le sujet du premier verbe d'action. Il est mis en relief par sa position au tout début du premier vers : "ce monstre". Il s'agit d'une métaphore, car ce monstre n'est autre que la religion protestante, les "réformés".


Des vers 9 à 16,  Ronsard se détourne de la cellule familiale pour évoquer les différentes professions.

Professions manuelles, commerciales, libérales, des villes et des campagnes, et touchant tous les âges. Le choix des métiers cités suggère qu'aucune catégorie n'est épargnée, c'est donc un mal particulièrement dévastateur. Ce sont à nouveau des généralisations :

l'artisan

le pasteur (i.e. le berger)

l'avocat

le marinier

le marchand

le prud'homme

l'écolier

le laboureur

Nous trouvons à nouveau une longue phrase au début du mouvement, constituée par de nombreux parallélismes (sujet / a laissé / COD), mais pour montrer que ce conflit s'aggrave, le rythme s'accélère, grâce aux enjambements (v.15) et contre-rejets (v.13).

 

            A nouveau, la pensée réformiste est explicitement désignée comme responsable avec un complément circonstanciel de cause "par ce monstre" v.9. L'ordre établi a été renversé puisque chacun se détourne de ce qui devrait être sa préoccupation première. Le champ lexical des armes se renforce : "méchant", "une dague pointue", "une pique guerrière", "un couteau"... Là aussi nous trouvons des parallélismes, avec parfois une inversion. Les objets anodins, "la faux tortue", "son râteau", "son coutre" sont transformés en objets guerriers. C'est donc une véritable guerre.


  • A partir du vers 17, il n'évoque plus vraiment des groupes de personnes mais plutôt des notions abstraites, mais qui sont présentées comme des personnes : ce sont donc des allégories. Par exemple : "Morte est l'autorité". La formule relève de l'hyperbole. Le champ lexical de la morale (ou plutôt de l'immoralité) se renforce : "vice déréglé", "licence", "le désir, l'avarice, et l'erreur insensé".

Tout ce passage est désagréable à l'oreille, mais pourquoi ? Avez-vous repéré les sons qui étaient répétés de façon excessive ?

 

vit, guise, vice, licence, permise, désir, avarice, insensé, sens dessus dessous renversé

 

Il y a une allitération en [s] ET une assonance en [i]. Deux sons agressifs pour l'oreille.

 

Autre hyperbole, l'effet de répétition pour évoquer les lieux de culte. "lieux saints" est juste à côté de son attribut du COI : "horrible voirie, / Un assassinement et une pillerie". Or les Eglises sont supposées offrir l'asile, mais de manière illogique, ceux qui se battent pour des questions de religion ne respectent pas même les lieux religieux.

Les valeurs positives ("Justice et Raison") sont écrasées littéralement par l'accumulation de la ligne 25-26 : "le brigandage, / La force, les couteaux, le sang et le carnage".

 

Une nouvelle allégorie dépeint l'état de la France : c'est le recours à la figure de Mars, le dieu romain de la guerre (Arès chez les Grecs). Mais ce Mars incarne en même temps la pensée réformiste, car il est associé à de nombreux termes péjoratifs : "faux zèle", "vaine apparence", "erreur d'un étranger". Une première comparaison le désigne : "ainsi qu'une furie" (les Furies sont des créatures mythologiques qui s'acharnent sur leurs victimes).

La France est présente sous forme d'allégorie puisqu'elle est "farouche à son prince", "opiniâtre". Il s'agit en fait d'une métaphore filée, qui annonce la dernière comparaison, celle du poulain qui n'obéit pas à son cavalier (des vers 33 à 36).

Dans cette comparaison, le cavalier est bien sûr le Roi, encore jeune, et à travers lui à la régente Catherine de Médicis.

 

Les deux derniers vers résument l'ensemble de son propos; il souligne cette démonstration avec l'adverbe "ainsi" v.37. Cette dernière partie prend la valeur d'un reproche direct d'incompétence à l'encontre des dirigeants.


Pour conclure :

 

Pour RONSARD, le conflit qui ravage la France n'a pas qu'un seul responsable. Il se montre explicitement hostile au Protestantisme, mais il n'hésite pas à suggérer que la Régente fait preuve d'incompétence dans sa façon de gérer la situation.

Nous pouvons donc dire que pour Ronsard, l'écriture poétique est mise au service d'une dénonciation virulente, qu'elle a une utilité directe. Il est donc bien un poète engagé.

Nous pouvons comparer sa vision de la situation à celle proposée par AGRIPPA D'AUBIGNE dans son poème intitulé "Les Tragiques", et notamment dans le Chant VII, aux vers 758 à 796. (voir aussi le manuel p.100)

           


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08/03/2022
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